Pays : USA
Durée : 2h44
Genre : Science-fiction
Sortie : 4 octobre 2017
Réalisateur : Denis Villeneuve
Distribution : Ryan Gosling, Harrison Ford, Jared Leto, Ana de Armas, Robin Wright, Sylvia Hoeks, Mackenzie Davis, Dave Bautista, Edward James Olmos
Histoire : En 2049, la société est fragilisée par les nombreuses tensions entre les humains et leurs esclaves créés par bioingénierie. L’officier K est un Blade Runner : il fait partie d’une force d’intervention d’élite chargée de trouver et d’éliminer ceux qui n’obéissent pas aux ordres des humains. Lorsqu’il découvre un secret enfoui depuis longtemps et capable de changer le monde, les plus hautes instances décident que c’est à son tour d’être traqué et éliminé. Son seul espoir est de retrouver Rick Deckard, un ancien Blade Runner qui a disparu depuis des décennies..
En acceptant l’idée qu’une suite à Blade Runner est une belle idée à défaut d’en être une bonne, on entre dans la salle dans l’espoir de voir Denis Villeneuve, l’un des cinéastes incontournables du renouveau hollywoodien (quoiqu’on pense de ses réalisations US), proposer un blockbuster différent de tout-venant.
Et c’est de côté-ci, Blade Runner 2049 répond largement à nos attentes. A des années lumières des gros films qui cherchent à en mettre plein la vue avec une action frénétique, le film de Villeneuve prend son temps, impose, comme son illustre devancier, une direction artistique à la beauté spectaculaire et nous plonge dans un univers à la fois familier et pourtant bien différent de celui que l’on connaissait 30 ans plus tôt. En ce sens, Blade Runner 2049 est une suite qui fait honneur au film de Ridley Scott et il faut l’avouer, c’était loin d’être gagné d’avance malgré les énormes moyens mis à disposition.
La force de Villeneuve comme cinéaste a toujours été de bien s’entourer et de faire confiance à ses équipes. Son cinéma, plus que celui d’autres illustres collègues, provient de cette symbiose artistique née avant et pendant le tournage. A ce titre, l’apport de son chef op, Roger Deakins, est à mettre en exergue : Blade Runner 2049 ne serait pas cet impressionnant sommet d’images à la beauté sidérante sans le génial œil d’un des plus grands directeurs de la photo en activité (bref, filez-lui enfin cet Oscar tant mérité).
Techniquement, on le voit, BR 2049 a un sacré répondant. On ne peut alors que pinailler pour son absence d’impact visionnaire qu’avait Blade Runner au point d’influencer des générations d’artistes en tous genres depuis des décennies. Mais existe-t-il aujourd’hui un film qui pourrait prétendre à un tel statut ? On cherche les noms même si un Cameron, un Miller ou un Cuarón pourrait entrer dans la discussion.
Mais voilà, un film a beau être une expérience sensitive unique (qui plus est en IMAX, véritable écrin parfait pour ce BR 2049), il faut aussi qu’il puisse nous raconter quelque chose. Surtout quand la durée du spectacle affiche un bon 2h44 au compteur. Et c’est bien là où le bât blesse. Alors qu’on était prêt à embarquer dans un récit qui allait nous amener dans des territoires non exploitées par Ridley Scott qui avait librement adapté les écrits de Philip K. Dick, le film ne nous sert que des questionnements presque réchauffés. Quelques belles idées sont lancées, mais au lieu de bâtir une solide intrigue autour d’elle, Villeneuve se contente le plus souvent de s’en remettre au charisme robotique de sa star, Ryan Gosling, visiblement parfait pour jouer le rôle d’un repliquant qui se découvre des émotions, mais pas trop.
Cinéaste de femmes, Denis Villeneuve le prouve encore en offrant les rares moments d’émotions franchement convaincants à ses personnages féminins, notamment à Joi (la craquante Ana de Armas), cette intelligence artificielle qui sert de femme virtuelle à K. L’occasion pour le cinéaste de nous offrir une séquence de plan à trois aussi tordue que terriblement touchante.
Du côté des mecs, c’est un peu la catastrophe à tous les étages. Si Gosling s’en sort donc pour cause de personnage qui colle à son jeu, Jared Leto et Harrison Ford sont victimes d’un scénario qui se contrefichent totalement de leur personnage. Le premier est un méchant lâché totalement par l’intrigue qui doit tout justifier au cours d’une longue séquence dialoguée au sens pour le moins ampoulé. Le second, celui que l’on attend le plus tant il fait le lien avec l’univers dans lequel on est plongé, arrive littéralement sur le tard pour n’être qu’un spectateur d’une intrigue qui aurait dû (au moins à ce moment-là) être tout entière centrée sur lui. Il y a vraiment de quoi faire la gueule en voyant un personnage aussi iconique que Rick Deckard traiter aussi faiblement même si Ford y croit visiblement bien plus ici que lorsqu’il a repris le rôle de Han Solo dans Star wars : Episode VII.
Déceptif à plus d’un titre, incroyablement trop long pour ce qu’il est, mais offrant un spectacle visuel souvent total, Blade Runner 2049 réussit paradoxalement à s’affranchir de son illustre modèle. Sans jamais pour autant être une œuvre visionnaire tout entière axée sur le futur. Le film de Villeneuve n’est finalement que le reflet de son époque. C’est à la fois beaucoup et bien trop peu !
Publié le 06/10/2017 par Laurent Pécha