Avec Under the silver lake, David Robert Mitchell confirme tout le bien que la révélation It follows avait laissé entrevoir. En changeant de genre (le polar cette fois) et surtout de lieu (la glamoureuse Los Angeles), le jeune réalisateur américain s’amuse à reprendre les figures éternelles du genre et à se les réapproprier de manière fascinante mais aussi souvent très déroutante. On s’est dit que le soumettre à notre quiz cinéma nous permettrait d’en savoir plus sur ses influences cinématographiques et peut-être nous donner quelques clés pour comprendre ce qui se cache vraiment sous ce lac d’argent. Grave erreur, David Robert Mitchell n’est pas le bon client pour cet exercice. Ou plutôt, c’est le meilleur mais il aurait fallu que l’on ait trois heures devant nous. Malheureusement, on n’avait que 20 minutes.
Le premier film que vous avez vu au cinéma ?
Je me souviens avoir vu Le chat qui vient de l’espace.
Le film que vous avez toujours voulu voir mais que vous n’avez toujours pas vu ?
Il y a tellement de choses. Je dois regarder ma liste (rires) C’est beaucoup pour moi.
Le film que tout le monde a vu sauf vous ?
Tout le monde ou en tout cas beaucoup de monde ont vu Ready Player One, mais je ne l’ai pas vu.
Le film dont vous pensez que vous êtes le seul à l’avoir vu ?
C’est un exercice très difficile pour moi, et je pense que vous allez me détester pour cela (rires).
Le film que vous adorez mais que tout le monde déteste ?
Je dois vraiment regarder dans ma collection personnelle.
Le film que tout le monde adore sauf vous ?
Je n’aime pas vraiment parler en mal du travail des autres.
Le film qui vous colle à la peau ?
Fenêtre sur cour d’Alfred Hitchcock est un film qui me réconforte et que je regarde souvent.
D’une certaine façon Under the silver lake est une sorte d’hommage ?
Mon film ne ressemble pas à Fenêtre sur cour, mais je ne peux nier que j’y déclare évidemment l’amour que j’ai pour le film d’Hitchcock.
Le film que vous dites aimer en public mais en fait pas vraiment ?
Si je n’aime pas un film, je ne m’en préoccupe pas et donc je n’en parle pas.
Le film que vous pouvez voir encore et encore ?
Il y aurait beaucoup, mais j’adore Zodiac de David Fincher. Tout est parfait dedans.
Le film qui vous donne envie de changer de vie ?
J’ai vu beaucoup de film en classe de seconde, et cela m’a certainement donné envie de faire des films. Mais il y en deux films pour lesquels j’ai ressenti une connexion particulière. Il s’agit de Les 400 coups et L’Argent de poche. Ainsi que du reste des films consacrés à Antoine Doinel.
Le film que vous aimez mais que vous ne reverrez jamais ?
Je ne sais pas, il n’y aucun film auquel je peux penser. J’ai souvent cette pensée un peu sinistre, où je me demande si c’est la dernière fois que je vois ce film. C’est un peu bête !
Le bon film qui aurait mérité d’être plus court ?
Il y a des films que j’aurais aimé voir plus souvent, mais par exemple, alors que beaucoup préfèrent la version cinéma d’Apocalypse now, je préfère la version Redux. Mais les deux versions sont toutes les deux importantes pour moi. S’il y a un film que j’apprécie, je vais simplement le regarder et l’apprécier, je ne vais pas me demander s’il devrait être différent. Quand quelqu’un fait un film, il va mettre ses tripes dedans, je ne pourrais pas m’opposer à ça, à ce qui est leur art.
A propos de vos films, les deux premiers étaient courts alors que justement Under the silver lake est très long.
C’est un challenge de faire un film aussi long. C’est beaucoup plus difficile, de beaucoup d’autres façons, c’est juste difficile de faire des films plus longs (rires). Mais je ne pourrais pas vous dire pourquoi j’ai ressenti le besoin que ce film soit long, mais cela m’a paru essentiel.
Le film le plus drôle ? D’ailleurs Under the silver lake laisse de la place à l’humour, contrairement à vos précédents travaux.
(Rires) Il y avait déjà un peu d’humour noir dans mes précédents films, un petit peu, juste pendant quelques moments. J’adore l’humour au cinéma. Dans les films des Marx Brothers par exemple, ou encore ceux de Lou Costello.
Le film le plus effrayant ?
Je n’ai pas vraiment peur de quoi que ce soit, mais j’aime toujours tenter de me faire peur. J’ai été élevé comme catholique donc L’Exorciste était vraiment effrayant pour moi. Mais plus maintenant.
Et les films de John Carpenter ? On a souvent évoqué Carpenter en parlant de It follows.
C’est plus divertissant pour moi qu’effrayant, personnellement.
Le film qui vous a fait le plus pleurer ?
Il est très difficile pour moi de pleurer devant un film, mais cela arrive de temps en temps. J’étais probablement à deux doigts de pleurer quand j’ai vu E.T. quand j’étais petit.
La scène dont vous ne vous lassez pas ?
Il y en a tellement. Encore une fois, c’est une question très difficile (rires).
Arrêtons les questions dures alors. Avec Under the silver lake, vous continuez à proposer des titres de film, après The myth of the american sleepover et It follows qui marquent les esprits, des titres qui sortent de l’ordinaire et qui sont particulièrement imagés.
Je fais juste très attention au titre. Quand j’ai une idée de titre généralement je m’assois et j’essaye de réfléchir si cela peut coller. Cela peut me prendre plusieurs heures. Je le choisis juste au moment où je commence à écrire le script. Donc, j’ai effectivement tendance à écrire mon scénario en ayant déjà le titre en tête.
Parlons de vos influences, The myth of the american sleepover s’inspirait des Teen-movies, It follows des films de John Carpenter et Jacques Tourneur. Pour Under the silver lake, il semblerait qu’il faille chercher du côté d’Hitchcock mais aussi et surtout de David Lynch ?
Oui c’est vrai mais il n’y a pas que ça. Il a aussi le cinéma d’Antonioni et aussi, beaucoup, beaucoup de films noirs, quelques films d’Altman.
Truffaut disait que l’on devait filmer ce que l’on connaît. L’action de vos deux premiers films se passe dans le Michigan, où vous êtes né, mais Under the silver lake se passe à Los Angeles ? Pourquoi ce désir d’évoquer la cité des Anges ?
Cela m’intéressait grandement de raconter une histoire se déroulant à LA, ou plus exactement un mystère prenant place à Los Angeles. Je suis fasciné par ses quartiers et leur feeling. Je voulais créer une sorte de nouvelle mythologie hollywoodienne.
Vous semblez avoir expérimenté la vie quotidienne à Los Angeles.
Il m’est apparu de plus en plus clairement que les environs étaient une sorte de fantasme, une distorsion de la ville. Le film n’est pas totalement à propos de quelque chose qui existe réellement, mais il découle d’endroits qui existent réellement.
Quand vous avez écrit le film, vous avez pensé à Andrew Garfield ? C’est la première fois que vous faites jouer une star.
Je suis un fan d’Andrew, j’ai pensé qu’il pouvait être fantastique pour ce rôle, et il était très enthousiaste à propos du scénario.
La scène avec le magazine de Spider-man qui lui reste coller à la main est forcément très drôle et ironique joué par lui.
Je n’avais aucun acteur particulier pour ce rôle en écrivant le scénario, mais ça a juste fonctionné de cette façon. Je ne sais pas ce qu’il a pensé de la scène pour tout vous dire. Je ne lui ai pas demandé.
Il y a toujours une dimension très crue et réaliste lors de vos scènes de sexe ou de séduction. Une approche plus européenne qu’américaine.
Je ne veux pas accentuer un quelconque aspect réaliste, mais si quelqu’un apparait comme étant réel, ça me parait bien. Je me laisse guider par mon instinct. J’avais l’idée que les scènes de sexe ou de la nudité allaient être traitées de façon très concrète.
Toutes les affiches de vos films sont remarquables, mais celle-ci est vraiment incroyable.
J’ai proposé certaines idées, mais ce sont les graphistes qui sont venus avec cette proposition. Toute l’équipe a participé. Mais je voulais qu’il y ait des choses cachées dans l’affiche. C’est quelque chose que j’ai demandé.
Il y a le film que vous écrivez, le film que vous tournez et le film que vous montez. Pour Under the silver lake, que ressentez-vous par rapport à ces trois étapes cruciales de la vie d’un film.
Je suis très fier du scénario, très fier de la production de ce film, et très heureux de voir ce que l’on a réussi à viser.
Publié le 08/08/2018 par Laurent Pécha