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Interview Morgan Krantz (Babysitter)

Comédien entraperçu dans des séries comme Girls, Morgan Krantz passe à la réalisation avec Babysitter, disponible sur e-cinema.com à partir du 29 décembre. Rencontre avec un jeune cinéaste habité.

 

Babysitter sort en exclusivité sur e-cinema.com. De plus en plus de films sont désormais exploités ainsi sans passer par la case salle de cinéma. Qu’en pensez-vous ?

J’accepte totalement le fait que la technologie soit en train de tout bouleverser. Ce que j’en pense personnellement, n’est pas important. Internet est comme un poids lourd qui ne peut être stoppé. La musique, les films, les taxis, les rencontres amoureuses, même la justice, tout est devenu digital. Mon seul espoir est que la technologie avance si vite que l’on puisse construire une machine à remonter le temps afin que je puisse retourner au 20ème siècle. Je me sentais plus en paix à cette époque-là.

 

Vous avez commencé votre carrière en tant qu’acteur. Pourquoi être passé à la mise en scène ? Avez-vous envie de privilégier une des deux voies ?

On me pose souvent cette question. J’ai la chance de pouvoir faire les deux. J’aime les deux expériences et elles se complètent tant. La plupart de mes cinéastes préférés ont d’abord été comédiens. Cela permet d’être meilleur pour des raisons évidentes.

 

Pourquoi avoir choisi de raconter cette histoire pour votre premier film ? Truffaut disait que le premier film est toujours celui qui doit être le plus personnel.

Si vous vous mettez à nu dans ce que vous écrivez, ou même si vous vous êtes convaincu que vous écrivez pour des raisons purement commerciales, vous vous reflétez dans ce que vous écrivez. La question est à quel point vous êtes conscient de l’immersion de votre personne dans vos écrits. Ça peut vous faire triper. Je me demande s’il ne vaut pas mieux rester ignorant. Beaucoup de personnes font du très bon travail sans aucune analyse. Mais d’autres (comme moi), prennent un plaisir pervers à évoquer les thèmes qui leur parlent au sein de leurs écrits. J’imagine que j’écris (et je réalise) des films pour me découvrir moi-même. Babysitter est un très fin voile d’un certain chapitre de mon adolescence. La prochaine fois, je pense que je rendrai le voile encore plus fin.

 

 

Il y a le film que l’on écrit, celui que l’on tourne et celui que l’on monte. Souvent, c’est différent. Comment cela s’est-il passé sur Babysitter ?

Toutes les étapes ont été très différentes. Le montage est une extension du processus d’écriture pour moi. A l’avenir, j’aimerai pouvoir écrire et tourner un film de manière totalement intuitive et réserver tous mes questionnements pour la salle de montage. J’ai envie d’aller si vite que je n’aurai pas le temps d’intellectualiser ce que je suis en train de faire. De m’en rendre compte uniquement quand c’est trop tard et devoir gérer tout cela au montage.

 

Comment êtes-vous parvenu à trouver l’argent pour financer le film ?  

Mon producteur, Luke Baybak, est un magicien. Avec une volonté hors du commun, nous sommes battus pour que des hommes d’affaires intéressés par le monde du cinéma investissent dans notre film. Je leur suis très reconnaissant. Ce sont des gens brillants qui ne connaissent sans doute pas grand-chose à la fabrication d’un film, mais qui ont toujours été très généreux. Pas seulement d’un point de vue financier, mais grâce à leur savoir-faire, leurs aptitudes dans le marketing et les négociations. Je pense notamment à notre producteur exécutif, Galo LeBron. Je lui suis tant redevable et je le considère comme un vrai ami.

 

Comment avez-vous choisi vos comédiens ? Notamment Daniele Watts qui joue la babysitter. Elle aurait pu être un choix étrange et pourtant elle s’avère absolument parfaite, apportant encore plus d’étrangeté à votre récit.

Elle est géniale. Elle est incapable de faire un mauvais geste. Elle joue avec le cœur. Je ne pense pas qu’elle soit un choix étrange. Le rôle a toujours été pour elle et je ne vois personne au monde qui aurait pu le jouer de la manière dont elle s’est appropriée le rôle.

Pour Max Burkholder, il a été choisi grâce à un casting. On partage la même date d’anniversaire et on a grandi dans le même quartier de Los Angeles. Mais les ressemblances s’arrêtent là : il est à des années lumières plus intelligent que moi au même âge. Et c’est un acteur incroyablement doué.

 

 

Etes-vous un cinéaste qui aime imposer une caractérisation forte de vos personnages ou préférez-vous laisser le spectateur libre de son ressenti ?

Je suis de l’école « il faut aimer et comprendre ses personnages ». J’ai besoin de trouver ce qui m’amuse chez eux. D’habitude, c’est leur côté pathétique ou désespéré qui m’amuse. Je dois donc sans cesse leur donner des vertus tant je suis attiré par leur pathos. Je pense que le public est moins enclin à pardonner que moi. Je ne crois pas aux gens mauvais. Ils sont très rares. Je suis très mal à l’aise à l’idée de condamner des gens dans la vie. Ce qui se reflète dans mon écriture. Il n’y a ainsi aucun méchant dans Babysitter. C’est bien plus complexe et réaliste ainsi.

 

D’où est venue l’idée du loup-garou ? Y a-t-il un lien avec le fait que votre mère soit une actrice ?

Ma mère a effectivement joué dans de nombreux films d’horreur et cette idée me vient directement d’un souvenir d’enfance. La voir se faire attaquer par un loup-garou et ne pas comprendre que tout ceci était faux, que c’était juste un film.

 Max Burkholder dans babysitter

 

Votre film est-il plus un récit sur le passage à l’âge adulte qu’une œuvre politique qui évoque le racisme aux USA ?

Quand j’étais en train d’écrire le script, je me suis rendu compte que l’histoire reflétait certaines des problèmes politiques et racistes qui gangrènent l’Amérique. Pour autant, mon intention était seulement de raconter l’histoire de la manière la plus vraie possible et dépeindre les personnages de la manière la plus authentique. Si, en plus, cela a pu refléter ce qui se passe dans mon pays, pourquoi pas ! Je le prends comme un vrai bonus. Mais en aucun cas, mon film est une œuvre à thèse. J’ai voulu faire quelque chose de contemporain, de naturel qui renvoie aux sentiments que j’éprouve dans la vie.

 

Votre film m’a fait plus d’une fois penser à la série American crime. Dans votre manière de montrer la lutte des classes et des races (au sens américain du terme) ?

Ce n’était pas mon intention initiale. Il y a des gens bien plus compétents que moi pour le faire. Mais c’est vrai que quand vous écrivez, vous cherchez sans cesse des obstacles que vos personnages devront franchir. Et le racisme en est un. Un formidable en plus. Je l’ai donc évoqué car tout simplement je l’ai observé. Notamment le racisme insidieux. C’est le plus dur à combattre. Il est presque invisible. Comment combattre quelque chose que l’on ne voit pas, mais qui était pourtant bien réel ?

 

 

Êtes-vous totalement satisfait de votre film ?

Je ne suis jamais totalement content. Mais cela se vérifie dans tous les domaines. Je suis toutefois fier de Babysitter. C’est le film que je devais faire.

 

Qu’avez-vous appris avec cette première expérience derrière la caméra ? Avez-vous un autre projet en tête ?

J’ai beaucoup appris sur ma manière de procéder et d’appréhender mon art. J’ai découvert avec quel genre de personnes j’ai envie de travailler. J’ai compris quand il est désormais nécessaire de dire qu’une chose est bien finie. J’ai réalisé ce qui m’excitait dans une scène, dans un personnage, dans un acteur. Je me sers de toute l’expérience emmagasinée sur Babysitter pour le film sur lequel je suis en train de travailler. Tout en essayant d’aller plus loin. J’ai l’intention de me livrer encore plus.  

Publié le 29/12/2017 par Laurent Pécha

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